Il a les traits tirés par la fatigue, un peu éprouvé, mais son sourire éclatant ne le quitte pas. Au foyer parental, à la rue Didouche-Mourad, en plein cœur d’Alger, le domicile de Khaled Drareni ne désemplit pas depuis ce vendredi soir.
Son père, toujours gagné par l’émotion, très accueillant, recevait avec joie les vagues incessantes de visiteurs venus revoir celui qui passe pour le symbole de la liberté de la presse. Sa maman, vêtue de rose, s’employait, elle, à ouvrir la porte aux convives d’un jour.
Le visage caché par le masque, Khaled répondait aux appels et distribuait boutades et embrassades aux amis qu’il recevait. Heureux de retrouver les siens, après onze longs mois dans les geôles, il montrait depuis sa fenêtre le port d’Alger dont la vue lui a visiblement beaucoup manqué.
“Le soir, quand ça s’illumine, ça devient encore plus beau, et vous voyez plus loin ? C’est le minaret de la Grande mosquée qui surplombe la baie d’Alger”, dit-il sur un ton admiratif, comme savourant ce moment de liberté retrouvée. Regard posé, il raconte comment il a été accueilli à sa sortie de prison.
“J’ai été bien reçu hier, ça m’a fait plaisir de voir autant de confrères et de militants de la liberté de la presse venus m’attendre à la prison de Koléa.” Le correspondant de TV5 Monde confie qu’il n’était pas au courant de la grâce présidentielle.
“Je ne savais pas que j’allais sortir hier, mais cela m’a fait plaisir de les voir nombreux à m’attendre. Le soutien de mes confrères et des Algériens n’a pas de prix, il faut le dire.” “Ce soutien nous aide à résister lorsqu’on est en prison, car c’est la preuve de notre innocence, et c’est ma grande fierté. Mes compatriotes et mes confrères me soutiennent”, dit-il avec un tantinet de fierté.
Comme durant toutes les épreuves qu’il a dû subir, il répète toujours qu’il n’est pas près de renoncer à son métier, celui-là même pour lequel il a payé un lourd tribut. “Ce que je compte faire, c’est ce que je sais faire le mieux, mon travail de journaliste ! J’exerce un formidable métier”.
Les mois de détention ne lui ont pas fait changer d’avis. “J’en ai eu encore plus conscience quand je suis rentré en prison, parce que j’ai été arrêté pour la pure et simple raison que j’ai fait mon travail de journaliste, ni plus ni moins, quoi que l’on puisse dire. Tout le monde connaît la vérité, y compris mes accusateurs”.
Sur un ton encore plus déterminé, il soutient : “Je suis un journaliste libre et indépendant, et c’est ce qui m’a coûté onze mois de prison, mais j’ai accepté cette épreuve avec sérénité. Je me suis dit que si c’était le prix à payer, alors qu’il en soit ainsi (…).”
“Je continuerai, poursuit-il, à faire mon travail de journaliste, à le faire tous les jours, de la même manière que je le faisais avant, de manière libre, indépendante et professionnelle (…).”
Un engagement. Une détermination. Comme quoi, la prison a ragaillardi l’homme…
Imène AMOKRANE