De prime abord, l’ostensible sanction exprimée par plus de 80% des électeurs potentiels qui ont boudé les urnes, samedi, à l’occasion du vote devant élire les onze représentants de la circonscription électorale de Constantine dans la Chambre basse du Parlement, entache la représentativité des futurs députés.
Ils devront d’ores et déjà s’accommoder du sobriquet de “député mal élu” et autres péjoratifs peu soucieux de l’immunité parlementaire que leur confère ce nouveau statut.
À Constantine, ils sont pas moins de 1 514 candidats en instance d’un mandatement providentiel pour être acteurs de la neuvième législature depuis l’indépendance.
Aussi indécise que stressante, l’attente sera longue pour ces prétendants, notamment les néo-candidats, séduits qu’ils étaient, par les prêches lénifiants vantant l’inaliénable résolution du rajeunissement du personnel politique.
Ils y ont cru et ont mené des campagnes acharnées pour certains avant de modérer leurs ardeurs face au désaveu hautement significatif infligé par le plus faible taux de participation à une élection législative, jamais atteint, à Constantine.
L’adhésion à hauteur de 19,65% des votants couronne, en effet, la désaffection citoyenne qui a ponctué les péripéties d’une campagne électorale insipide et qui n’aura guère réussi à faire émerger quelques attractivités en termes de profils et/ou d’idées. Critères que les moins enthousiastes parmi les votants ont tenté de déceler chez les postulants de cette élection inédite.
Gueule de bois au lendemain du désaveu populaire implacable, les candidats se sont tus subitement et leurs portraits disparus des réseaux sociaux qu’ils inondaient depuis plus d’un mois.
Il y a même une candidate constantinoise, ex-élue locale d’un parti né avec des moustaches, devenue indépendante, qui s’en est prise sur sa page Facebook aux citoyens d’une localité où elle aurait perdu tout espoir de glaner quelques voix conséquemment aux tendances révélées par les premiers dépouillements.
Petites gens des zones d’ombre et des localités oubliées qui étaient pourtant au centre de ses préoccupations durant sa campagne, auxquels elle reproche présentement le fait d’avoir cédé au chant des sirènes, “la chkara”, dit-elle. Des “gueux” naïfs qui n’ont peut-être pas changé mais qui n’oublient pas non plus. Constantine c’est aussi l’un des fiefs du Hirak.
La ville n’a raté aucune occasion pour résonner aux intonations des milliers de manifestants qui, sans relâche, ont assailli la rue depuis le 22 Février 2019, jusqu’à l’interdiction des marches par les pouvoirs publics.
La sanction, à savoir l’abstention, vient surtout de ce mouvement populaire irréductible qui s’est prononcé sans détour sur la perspective de ces législatives depuis plusieurs mois déjà.
Un Hirak qui a déjà impacté le déroulement dans cette ville de l’élection présidentielle du 12 décembre 2019 et du référendum sur la révision constitutionnelle du 1er novembre 2020 par des taux d’abstention record qui n’égalent pas néanmoins celui de ce samedi 12 juin 2021.
Le désamour entre les Constantinois et l’urne, remonte, à vrai dire, à la deuxième décennie du régime de Bouteflika. Une période durant laquelle la ville s’était carrément inscrite dans une logique abstentionniste devant le peu de crédit accordé à des élections où l’argent sale se mêlait au bourrage des urnes et traficotage des voix.
Lors des élections législatives de mai 2017, la wilaya de Constantine avait également enregistré l’un des plus faibles taux de participation au niveau national, quatrième après Alger, Béjaïa et Tizi Ouzou avec 26,14% de votants.
Kamel GHIMOUZE