Le directeur général de l'École supérieure de la magistrature, Abdelkrim Djadi, a mis, hier, en avant, la nature complexe des procédures visant à récupérer les biens mal acquis ou issus de la corruption.
Pas moins de 150 commissions rogatoires en matière de lutte contre la corruption et le blanchiment des capitaux ont été lancées par la justice algérienne et sont actuellement en cours à l’étranger, a révélé, hier, le directeur général de l'École supérieure de la magistrature, Abdelkrim Djadi.
L’invité de la rédaction d’Alger Chaîne III de la Radio nationale, qui a été interrogé sur la capacité des magistrats algériens à mener des enquêtes à l’extérieur du pays et la lenteur constatée dans le traitement des dossiers liés à la corruption et la récupération des biens mal acquis, a plutôt mis en avant la nature complexe des procédures.
“Il faut savoir que pour récupérer un bien mal acquis, il faut d’abord le déterminer en tant que tel, ensuite, trouver l’endroit et le régime juridique de l’objet à récupérer. Pour ce faire, il y a des étapes à suivre, à savoir le gel, la saisie conservatoire, puis la confiscation et donc la nécessité d’une décision judiciaire définitive pour entrer dans l’exequatur. Toutes ces procédures deviennent complexes lorsque nous travaillons avec des partenaires étrangers”, a-t-il expliqué.
Dans ce cas précisément, Abdelkrim Djadi a souligné qu’“il y a des pays qui facilitent l’entraide judiciaire, d’autres qui vont à une vitesse moins rapide et certains qui,pratiquement, nous compliquent la tâche”.
La lenteur donc observée dans le traitement des affaires de blanchiment d’argent, notamment, s’explique aussi, selon le DG de l’École supérieure de la magistrature, par le fait que certaines enquêtes nécessitent des “compléments d’informations par rapport à une donnée qui intéresse dans le dossier”.
“Nous pouvons dès lors lancer une autre commission rogatoire, et c’est pour cela que le traitement de ce genre d’affaires peut durer dans le temps”, a-t-il précisé, mettant ainsi l’accent sur l’importance de “ne pas traiter dans la précipitation ce genre d’affaires”, que “chaque cas a ses spécificités”, et que “le plus important est d’avancer sûrement sur chaque dossier”.
S’agissant du volet lié à la formation des magistrats algériens, Abdelkrim Djadi est revenu sur les mutations que connaît la société, l’introduction des TIC dans la vie privée et professionnelle des individus et les nouveaux moyens de communication qui ont engendré, selon lui, de nouvelles formes de criminalité.
“Nous connaissons aussi une évolution dans le monde de la finance, de l’économie, de l’entreprise, etc. Face à ces nouvelles formes, il fallait mettre les moyens pour avoir une réponse pénale efficace, à savoir spécialiser des juges de parquet, d’instruction et de siège, et créer également des juridictions spécialisées”, a-t-il énuméré, rappelant que l’Algérie dispose actuellement de deux pôles spécialisés : le premier dans la lutte contre la cybercriminalité et le second dans la lutte contre le crime économique et financier, en plus d’une section internationale spécialisée dans la lutte contre le terrorisme, et qui siège au tribunal de Sidi M’hamed, à Alger.
Abdelkrim Djadi a enfin fait savoir que deux groupes de magistrats se spécialisent actuellement au niveau de son école dans le droit pénal des affaires et dans le droit des affaires commerciales, pour ce qui est de l’analyse financière et les techniques de l’enquête financière.
Mehdi MEHENNI