Les raisons de l’absence des témoignages de Khène et de Taleb Ibrahimi sont “exclusivement cinématographiques”, souligne le réalisateur.
Sitôt diffusé vendredi sur Canal Algérie, le documentaire “Ugema” qui revient sur la naissance et le combat de l’Union générale des étudiants musulmans algériens dans la lutte pour la libération nationale, suscite une polémique. Cette controverse survient après les déclarations de Nacer Djabi, qui regrette que les témoignages d’Ahmed Taleb Ibrahimi et de Lamine Khène, aient été retirés de cette production.
Car, “ils ont choisi de s’exprimer exclusivement en langue arabe”, estime-t-il. Suite aux précisions du sociologue et coauteur du documentaire (article paru hier dans nos colonnes), le réalisateur Mohamed Latrèche, sollicité par nos soins, apporte sa version des faits.
D’emblée, sur la “censure qui serait motivée par des critères linguistiques”, M. Latrèche indique que “Djabi utilise la question clivante de la langue et omet de dire que d’autres propos en langue française n’ont pas été retenus au montage. Nous citerons ceux de Mme Hafsa Bisker, de Mme Bendissari, de M. Abdelalim Medjaoui, de M. Feradi et de M. Clément Henry Moore”.
À cet effet, le cinéaste considère que l’argument apporté par Nacer Djabi se “révèle infondé, fallacieux et tendancieux”. Le réalisateur ne se sent nullement concerné par cette polémique sur les langues justifiant que lui-même est “le produit de l’école algérienne arabisée des années 80” et le producteur du film, M. Ziani “est de formation exclusivement arabophone”.
Il considère que l’expérience de l’Ugema est une “entreprise collective”, alors que M. Djabi “focalise son attaque sur des considérations d’ordre individuel”. “Je rappelle que M. Lamine Khène et M. Taleb Ibrahimi, des militants aux parcours extraordinaires, n’envisageaient nullement leur travail militant sous cet angle. Leur apport à la lutte de libération nationale dépasse ce type de considération.” Et de conclure, suite à la “bonne” réception du film par les téléspectateurs : “Nous disposons de plusieurs heures d’entretien de MM. Khène, Taleb Ibrahimi et d’autres militants.
Rien n’empêche l’EPTV, les ministères de la Culture et des Moudjahidine de mobiliser les moyens pour réaliser une série de plusieurs épisodes afin de retracer plus amplement l'histoire de l’Ugema. L’appel est lancé !” Concernant l’absence des témoignages de Khène et de Taleb Ibrahimi, le réalisateur souligne que les raisons sont “exclusivement cinématographiques”.
À ce sujet, il explique que pour un film documentaire d’une heure, le cinéaste rassemble des dizaines d’heures d'interview pour en garder à la fin quelques dizaines de minutes. “Ainsi le travail de montage se révèle comme l'épreuve de vérité où sont déterminants seuls les critères de rythme, de lisibilité et de construction”, signale-t-il.
Selon M. Latrèche “l’idéologie n’a pas de place, hormis s’il s’agit de films de propagande. Les cinquante minutes du film se sont révélées insuffisantes pour donner corps à la parole de tous les militants que nous avons rencontrés”.
Pour notre interlocuteur, il fallait faire des choix et il les “assume”. “Des choix qui vont uniquement dans l'intérêt du film et de la narration. C’est mon seul souci. La politique dont parle M. Djabi, je ne la pratique pas. J’essaye de pratiquer uniquement mon métier de réalisateur”, martèle-t-il.
Hana M.