C’est un constat sans complaisance du secteur de la santé que le Syndicat national des spécialistes de la santé publique (SNPSSP) a dressé, hier, dans une lettre adressée au président de la République, Abdelmadjid Tebboune, lui demandant d’intervenir pour “mettre un terme à la désespérance qui est en train de gagner un secteur stratégique qui se vide de ses compétences au profit du secteur privé ou de l’étranger, et ce, dans une indifférence totale”.
Le SNPSSP réclame, haut et fort, des mesures urgentes devant délivrer un système public de santé qui est “en proie à une crise multiforme”. Il exige, en un mot, un système public de santé fort au bénéfice de toute la population et qui mettra un terme à la désespérance qui a gagné la corporation depuis des années. En effet, le SNPSSP appelle le premier magistrat du pays “à mettre un terme à ce statu quo mortifère et à débloquer la situation en attendant les mesures structurelles de nature à améliorer la gouvernance générale du secteur de la santé dans le cadre d’une véritable politique de santé”.
Les rédacteurs du plaidoyer n’y sont pas allés de main morte, afin de dresser, sans détour, un tableau noir sur le système public de santé impacté par la dernière crise sanitaire induite par le coronavirus. Inspiré sans doute par le constat des lacunes constatées tout au long de cette guerre sanitaire qui a mis le système national de santé à rude épreuve, le président du SNPSSP, le Dr Mohamed Yousfi, a tenu à rappeler que la crise, qui a mis à genoux le système national de santé, ne date pas d’aujourd’hui. “Depuis plusieurs années, le SNPSSP n’a cessé d’alerter les différents responsables à tous les niveaux de l’État sur la lente dérive du système public de santé qui menaçait de le mener exactement là où il est aujourd’hui”, peut-on lire dans la longue lettre adressée à Tebboune.
La nouvelle alerte des spécialistes s’assigne pour objectif de dénoncer l’absence de stratégie et traite de toutes les lacunes constatées dans un secteur qui se trouve “vidé de ses forces vives, incapable de fournir les soins de qualité que le citoyen est en droit d'attendre à travers le territoire national, et en proie à une profonde crise de confiance de la population envers le système de santé, d’une part, et des professionnels de santé envers leur employeur, d’autre part”. Pour le SNPSSP, l’heure est vraiment grave, puisque “le système public de santé menace de s’effondrer”. Les auteurs du plaidoyer n’ont pas manqué de souligner que cette “lente dérive du système sanitaire” a été évidemment précipitée par la crise sanitaire.
Laquelle crise a reporté sine die “les éventuelles actions de redressement projetées suite à la nouvelle loi relative à la santé de 2018 dont les textes d’application n’ont toujours pas vu le jour plus de deux ans après sa promulgation”. Pour étayer encore leur constat peu reluisant, les praticiens spécialistes estiment que “c’est la totalité du pays qui se trouve plongée de fait dans une gigantesque zone d’ombre sanitaire”, ironise le syndicat, qui soutient que l’interpellation du président de la République vise à restaurer la confiance et à redonner de l’espoir aux professionnels de la santé, en accédant aux doléances du secteur : “La généralisation de la prime du service civil à l’ensemble des spécialistes exerçant dans le Sud et le Grand Sud, les Hauts-Plateaux et les zones enclavées, ainsi que la mise en œuvre des autres mesures incitatives annoncées par le gouvernement en 2019. La mise en conformité de la prime d’intéressement avec les différents grades du statut.”
Le syndicat attend désespérément la réparation des anomalies et des dispositions “iniques contenues dans le statut particulier de novembre 2009, et dont la proposition d’amendement est en souffrance auprès de la Direction générale de la fonction publique depuis 10 ans. La mise en place de toutes ces mesures incitatives est une revendication du syndicat depuis 18 ans, mais nous sommes toujours en attente de leur concrétisation”, peut-on encore lire. Le SNPSSP n’a pas omis de relever avec satisfaction la décision d’abroger le service civil et de le remplacer par un dispositif incitatif.
Hanafi H.