L’Actualité

On ne censure pas un livre

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Hassane OUALI Publié 31 Mars 2022 à 09:39

Impensable. Des livres édités en Algérie et vendus dans toutes les librairies du pays depuis des années sont frappés d’interdiction au Salon international du livre d’Alger. Une censure. Une interdiction fondée sur un “ordre verbal”, sans décision de justice. Pourtant les titres en question, édités par Koukou Éditions que dirige Arezki Aït-Larbi, n’ont rien de subversif qui pourrait éventuellement justifier une proscription. Et encore. Cela doit passer par un mandat du juge comme le stipule la Constitution. Mais au-delà de l’aspect juridique, quel sens peut avoir la censure d’un livre à l’heure actuelle ? Aucun. Si ce n’est de la régression intellectuelle inféconde et une attaque contre la liberté de création et de diffusion des idées. Qui peut décider à la place du lecteur ce qu’il faut lire ou pas ? L’administration ne peut en aucun cas s’y substituer, à moins qu’elle ne s’érige en police de la pensée. Parmi les livres frappés d’interdiction se trouve celui d’un grand médecin, Abdellah Aggoune, dans lequel il rend hommage, dans un récit poignant, aux victimes de la barbarie intégriste. Parmi les livres blacklistés se trouve également la sérieuse réflexion faite par l’éminent sociologue Mohamed Mebtoul, Liberté, dignité, citoyenneté, ou encore celui de Mokrane Aït-Larbi, Démoctature. 

Des efforts intellectuels qui nourrissent le débat public sur des questions sérieuses dont les Algériens ont grandement besoin. Mais ce qui préoccupe le plus par cette mesure c’est le message qu’elle renvoie. Comment peut-on avoir peur d’un livre ? Peut-il à ce point déstabiliser des citadelles ? Cela renseigne à la fois sur l’indigence et la fébrilité ambiante. Pas du tout rassurant. Un État ne sort jamais victorieux lorsqu’il laisse faire la censure de la production intellectuelle. Avoir peur des idées, surtout quand elles sont intelligentes, c’est préparer le lit de l’ignorance et ce qu’elle charrie comme désastre culturel dans une société qui a longtemps souffert des affres de la pensée unique.

C’est parce que l’intelligence a été combattue sous le régime du parti unique que les “idées” noires de l’islamisme ont connu un épanouissement jusqu’à faire des Algériens des monstres assassins. Les victimes étaient justement celles et ceux qui portaient la lumière. Les Djaout, Liabes, Boucebci et Boukhebza seraient alors morts pour qu’en 2002, l’on puisse interdire des livres avec une légèreté déconcertante. Voulons-nous une Algérie qui pense et avance librement ou celle couverte par le voile de l’ignorance ? Laisser faire une pareille agression contre des livres, c’est faire un grand bond en arrière. Un renoncement. Un saut dans l’inconnu. 

Par : Hassane Ouali

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