L’idée centrale du livre de Abdallah Cheghnane, publié ce mois-ci aux éditions Dahlab, se focalise sur la fameuse lettre écrite de la main même de Saâd Dahlab à la veille de la victoire du 19 mars 1962.
Les chroniques de notre histoire s’enrichissent de l’œuvre intitulée Saâd Dahlab, militant et diplomate. Une nouveauté conçue d’éléments biographiques et de recueil de documents présentés par son gendre, Abdallah Cheghnane, aux éditions Dahlab.
On se souvient que c’est avec la satisfaction du devoir accompli que le regretté Saâd Dahlab (1918-2000) a légué à l’histoire son livre frappé du sceau mémorialiste, qu’il avait intitulé Mission accomplie pour l’indépendance de l’Algérie (1990). Un recueil-témoin accrédité du label “Dahlab” ou plutôt un état signalétique de tout ce qui s’était dit à la table des négociations qui ont eu lieu à Évian-les-Bains, dite Évian (France), du 7 au 18 mars 1962.
Quoi qu’il en était, l’œuvre mémoire de ce natif de Ksar Chellala (wilaya de Tiaret) n’est que la conclusion ou plutôt le point final des Accords d'Évian qui résultent après d’âpres négociations entre les représentants du gouvernement de la République française et du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA).
Et au soir du 18 mars 1962 à 17h35, a été signé par Krim Belkacem (1922-1970) à Évian, au bas du document de souveraineté, les Accords à l'indépendance de l'Algérie, le 3 juillet. C’est ce qui authentifie la fin d’un conflit inégalement armé et qui s'est déroulé de 1954 à 1962 avec, au bout, la Victoire après 7 ans, 4 mois et 18 jours d’âpre lutte.
Ironie de l’histoire ou est-ce une coïncidence d’éphéméride ? Les derniers 18 jours d’une guerre sans merci coïncident avec le 18 mars 1962. “Après douze jours d’un travail acharné, de luttes constantes, de répliques, de mises au point réciproques, d’incidents violents, de douceur, de diplomatie, de colère, de calme, de tempête, nous voici à l’ultime instant” (Saâd Dahlab)”, lit-on dans les minutes qu’avait écrit Saâd Dahlab lors de “la dernière séance” d’Évian du 18 mars 1962.
“Pour rappel, la signature de part et d’autre a été opérée à l’issue de la relecture du document de 93 feuillets. Ce qui n’était pas pour rassurer Louis Joxe (1901-1991) qui était pressé d’en finir,” a-t-on appris de l’auteur, Abdallah Cheghnane, rencontré à la librairie du Tiers-Monde. Mais qu’importait l’humeur du fonctionnaire français, Mostepha Seghir lisait à son aise pour la délégation algérienne et ce, jusqu’à l’ultime revendication. “Ce jour-là, Saâd Dahlab a dit : ‘C’est le chef de la délégation, en l’occurrence Krim Belkacem qui doit signer pour la partie algérienne’’’, a ajouté notre interlocuteur.
D’ailleurs, l’idée leader du livre d’Abdallah Cheghnane se focalise sur la fameuse lettre manuscrite écrite par Saâd Dahlab la veille de la victoire du 19 mars 1962. “Une ère nouvelle va naître. Les aspirations nationales du peuple algérien vont se concrétiser. L’Algérie sort de la nuit. Elle voit enfin le jour. L’Algérie c’est l’Algérie.
La France reconnaît enfin l’Algérie…” (Saâd Dahlab). D’où le vœu et la volonté de l’auteur d’ajouter, dans les manuels d’histoire, ce document d’inégalable valeur historique et littéraire. Et le soir même à 22h, dans sa résidence, Saâd Dahlab a reçu un appel téléphonique d’Isabelle Vichniac (1917-2006) qui était l’ancienne correspondante du journal Le Monde à Genève, à laquelle il avait répondu que sa “mission est terminée et qu’il retourne à ses moutons”. “D’où l’encart mensonger du lendemain, à la Une, qui faisait état de la démission de mon beau-père du GPRA”, a ajouté notre interlocuteur, qui a interrompu ses études à l’appel du FLN, le 19 mai 1956.
Outre qu’il narre simultanément son propre itinéraire de résistant durant la grève des huit jours (du 28 janvier au 4 février 1957), l’auteur exhume également le parcours de Saâd Dahlab avec toutefois le rajout d’une pile de documents inédits, puisés dans le fonds documentaire du défunt, et qu’il a reproduit en annexe de son livre, qui est publié à l’occasion du 60e anniversaire de la signature des Accords d’Évian, le 18 mars 1962.
À vrai dire, l’œuvre livresque d’Abdallah Cheghnane est un filon documentaire pour l’historien.
LOUHAL Nourreddine
Saâd Dahlab, militant et diplomate,
de Abdallah Cheghnane
(éd Dahlab, 250 pages, 1000 DA)