À l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, la revue annuelle La Place, fondée par Saadia Gacem et Maya Ouabadi, a été présentée avant-hier au public et à la presse.
Elle tend à visibiliser le travail, la création et la parole féminines dans ce nouvel espace éditorial et à “mettre en valeur les productions et le combat” de femmes. La première revue féministe algérienne a été lancée avant-hier à l’occasion du 8 mars, Journée internationale des droits des femmes.
À l’espace Rhizome, à Alger, ses fondatrices Saadia Gacem, chercheure indépendante et militante féministe, et Maya Ouabadi, éditrice et fondatrice de la revue de critique littéraire Fassl, ont présenté leur revue et en ont expliqué les objectifs. Visibiliser ce qui se crée en Algérie du côté des femmes, à travers leur travail, leur création et leur parole dans un espace qui n’existe pas vraiment et qu’elles sont arrivées à bâtir grâce à des années de recherche et à la contribution de nombreuses militantes, écrivaines, poétesses et journalistes, à l’instar, entre autres, de Fadhila Boumendjel Chitour, de Souad Labbize, de Louiza Ammi Sid et de Meriem Medjkane, pour ce numéro 0.
Par cette publication, elles souhaitent, écrivent-elles dans l’édito, “contribuer à la mise en valeur de leurs productions et de leur combat en Algérie par des entretiens, des chroniques, des créations inédites, des reportages et des images d’archives”.
L’idée d’une revue féministe algérienne, soulignent-elles, “est venue après de nombreuses discussions autour des questions qui nous touchent en tant que femmes ; notre rôle, nos droits, nos non-droits, nos problèmes, notre place…”, d’où le nom de la revue La Place, ou “Lablassa” en derdja.
À ce propos, Saadia Gacem indique : “On parlait beaucoup de notre place, de qui on est, qu’est-ce qu’on fait, de la place des femmes dans tous les domaines, les lieux publics, de notre passion littéraire aussi, à Maya et à moi, qui est l’écrivaine Annie Ernaux et son livre La Place qui nous a beaucoup marquées, que ce soit son écriture à la fois accessible et intimiste, universelle aussi dans laquelle je me retrouve même si nous n’avons pas vécu dans la même période, ni espace.”
Pour ce premier numéro, composé de rubriques dont les titres empruntent à des créations musicales, littéraires ou cinématographiques féminines, la parole est donnée à des Algériennes de générations et d’horizons différents. Médecin et présidente du réseau Wassila, Fadhila Boumendjel Chitour, dans un entretien accordé à la journaliste Asma Benazouz, se raconte et raconte la naissance de son militantisme, d’abord humaniste, dans un contexte qui est celui de la guerre d’Indépendance puis de la décennie noire. “Cet entretien, a-t-elle expliqué devant les présents, a été pour moi un exercice d’introspection.”
Elle y revient sur l’assassinat de son oncle Ali Boumendjel, les conséquences de la guerre, son métier de médecin, en lâchant cette phrase : “Mon féminisme, dont je n’avais pas compris les origines, vient peut-être de ma mère. J’aurais aimé lui dire à quel point elle était une femme formidable. Elle nous a donné, à ma jeune sœur et à moi, une liberté et une confiance évidentes. Tellement évidentes qu’il aura fallu du temps et de l’expérience pour les percevoir.”
Par ailleurs, plusieurs autres thématiques sont traitées par les contributrices, en premier lieu un texte sur les féminicides par Narimène Mouaci et Wiam Awres, accompagné de la liste de tous les féminicides commis en 2021.
Yasmine AZZOUZ