Des Gens et des Faits 101e partie

LA BOURGEOISE

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Yasmina HANANE Publié 13 Avril 2022 à 12:00

Résumé : Mordjana reprenait confiance en elle et s’occupait mieux de sa petite personne, au grand soulagement de Samir, qui ne supportait plus de la voir triste. Elle voulait aussi passer son permis de conduire et Malika l’avait encouragée. Cependant, Samir repensait de plus en plus à Ilhem, son ex-fiancée. L’envie de la revoir ne le quittait plus.

Un peu dérouté, il se traîne jusqu'à sa chambre et se laisse tomber de tout son long sur son lit.
Va-t-il appeler Ilhem ? Va-t-il la revoir ? Si l’envie ne lui manquait pas, l’appréhension le faisait hésiter. Mordjana a été assez ébranlée ces derniers temps. Il n’avait pas le droit de lui tourner le dos.
Il soupire et se reprend, et se dit qu’il était temps pour lui de s’habiller pour se rendre au bureau.
Il récupère quelques documents et les met dans son cartable, puis prend son blouson et les clefs de son véhicule avant de quitter la maison. Sa mère n’allait pas tarder à revenir, se dit-il. Ces derniers temps, elle lui avait parue plus calme. Ses relations avec Mordjana étaient plus sereines. Certes, elle aimait démontrer qu’elle était la maîtresse des lieux et celle qui devrait tout diriger elle-même, mais Mordjana avait aussi su la tranquilliser, en se montrant plus mûre et plus consciencieuse.
Lorsque Hasna s’absentait, elle dirigeait la maison d’une main de maître. Personne ne s’était encore plaint d’elle. Elle cuisinait bien et aimait gâter ses beaux-frères en préparant les plats traditionnels dont ils raffolaient ou les gâteaux qu’ils dégustaient avec leur café en fin d’après-midi. Elle savait aussi faire plaisir aux autres membres de la famille, qui avaient fini par l’apprécier à sa juste valeur. À chaque occasion, elle leur offrait des cadeaux ou les invitait à partager un moment autour d’une table garnie. On ne jurait plus que par elle lorsqu’on leur rendait visite. Un peu jalouse, Hasna finissait quand même par reconnaître que sans sa belle-fille elle n’aurait pas pu venir à bout des tâches ménagères et de l’entretien que nécessitait une maison aussi grande que la sienne.
Mordjana, modeste comme à ses habitudes, ne cessait de répéter qu’elle ne faisait que son devoir. On l’aimait aussi pour cette simplicité qu’elle affichait dans sa vie quotidienne. Elle était une femme accomplie, qui savait être à son avantage lorsqu’il le fallait, mais qui savait aussi s’effacer quand cela s’avérait nécessaire.
Samir l’aimait pour ce trait de caractère qu’elle ne montrait pas ouvertement, mais qui se devinait aisément.
Il repensait à ces années vécues auprès d’elle, et se dit qu’il ne pouvait espérer mieux de la vie. Seulement, il ne comprenait pas encore comment il pouvait partager son amour entre deux femmes. Il aimait sa femme, mais avant elle il avait aimé Ilhem et n’arrivait pas à l’oublier. Bien au contraire, ce sentiment prenait de l’ampleur dans son cœur, et son esprit ne lui accordait aucun répit. Il ne cessait de penser à elle ces derniers temps.
Il tira le frein à main et descendit de son véhicule. La journée était radieuse et incitait plutôt à faire de longues promenades qu’à se coffrer dans un bureau.
Il jette un coup d’œil à sa montre-bracelet. Il était presque midi.
Il hésite un moment avant de prendre son portable pour former le numéro d’Ilhem.
Une heure plus tard, ils se retrouvèrent attablés dans un restaurant. La jeune femme tendit la main pour toucher son ami.
-Je veux m’assurer que je ne rêve pas cette fois-ci aussi.
Samir sourit.
-Tu ne rêves pas. Tu es en face de moi, et nous allons déjeuner ensemble. Je n’ai pas beaucoup de temps à te consacrer Ilhem, mais j’avais envie de te revoir.
-Moi aussi. Je t’ai appelé à maintes reprises et...
Il lève la main.
-Tu connais mes circonstances. Je n’aimerais pas t’offusquer, Ilhem. Je ne suis pas libre dans mes mouvements et je n’aimerais pas que Mordjana se doute de quoi que ce soit.
-Oui. Je comprends.
Elle déglutit et reprend :
-Je comprends, Samir. Tu n’aimerais pas qu’elle souffre. Je sais que tu l’aimes.
-Oui. Je l’aime et je la respecte. C’est une femme qui a déjà trop souffert dans son enfance. Je n’aimerais pas la peiner. Elle m’aime, et ne cesse de répéter que c’est grâce à moi qu’elle a repris goût à la vie. Même si ces derniers temps, elle vit dans la peur et l’incertitude. Tout comme moi d’ailleurs.
Ilhem fronce les sourcils.
-Il y a anguille sous roche. Je ne te suis pas, Samir. Pourquoi vivez-vous tous les deux dans la peur et l’incertitude, alors que vous vous aimez ?
Il garde le silence et hésite un moment, puis lance :
-Nous n’arrivons pas à concevoir un enfant.
-Vous n’arrivez pas à concevoir un enfant ? C’est vite dit. Tu ne trouves pas ?

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