La Banque mondiale classe l’Algérie parmi les pays les moins résilients à la perspective d’un désengagement des firmes pétrolières et gazières des énergies fossiles et d’une accélération de la transition énergétique dans le monde.
Alors que les majors pétrolières et gazières accélèrent dans la transition énergétique, la pression monte d’un cran sur les compagnies nationales les moins préparées à cette tendance mondiale en faveur des énergies propres, voire sur les pays dont les économies restent fortement dépendantes des hydrocarbures. L'Agence internationale de l'énergie (AIE) a mis en garde la semaine dernière contre l’effet pervers de cette transition énergétique, qui semble monter en cadence, sur de nombreux pays exportateurs de pétrole.
Selon les prévisions de l’AIE, la poursuite de l’objectif de zéro émission nette de CO2 d'ici à 2050 permettrait, certes, à l'Opep de devenir encore plus dominante et de représenter plus de 50% de la production mondiale, mais ses approvisionnements se concentreraient sur un plus petit nombre de pays consommateurs. Le désengagement des majors et des États occidentaux des énergies fossiles provoquerait une chute de 75% du revenu annuel par habitant au niveau des pays pétroliers et gaziers en un peu plus d'une décennie.
Les pays les moins résilients face à cette perspective — dont les revenus issus de la vente des hydrocarbures n'ont pas été gérés de manière adéquate et efficiente en faveur de la diversification de l’économie — supporteront de plein fouet cette tendance mondiale en faveur de la transition énergétique. L’Algérie comprise. Selon un rapport de la Banque mondiale, l’Algérie, l'Irak, la Libye, le Venezuela, la Guinée équatoriale, le Nigeria, l'Iran, la Guyane, l'Azerbaïdjan et le Kazakhstan sont les pays producteurs de pétrole les plus vulnérables en raison de la forte exposition de leurs économies au secteur pétrolier et gazier et un déficit criant en matière de diversification.
Conscient des risques qui pèsent sur l’avenir de son pays, pourtant riche de ses réserves prouvées de brut, le ministre irakien des Finances Ali Allaoui, a récemment averti que la poursuite de l’objectif zéro émission d'ici à 2050, adopté par les principales nations et majors occidentales, pourrait être catastrophique pour le pays. Ali Allaoui a désespérément essayé de pousser vers des réformes économiques radicales dans le but d'éviter le krach à son pays. C’est une question qui interpelle aussi l’Algérie, dont l’économie demeure fortement dépendante des devises générées par le secteur pétrolier et gazier.
L’équation est d’autant plus complexe pour le pays car l’alternative aux hydrocarbures n’est pas sérieusement prise en compte dans les calculs budgétaires et énergétiques futurs. Acculés par le désengagement progressif des énergies fossiles amorcé par les grandes compagnies, au moment où la reprise des investissements devient vitale pour de nombreux pays producteurs de pétrole et de gaz, les pays pétroliers africains tentent de trouver une parade au retrait des majors, lors d’une table ronde, la semaine dernière au Nigeria, membre de l’Opep et premier producteur de pétrole en Afrique.
Ont pris part à cette réunion des représentants du Nigeria, de l'Angola, de l'Algérie, de l'Égypte, du Gabon, du Cameroun et du Niger. Face à la perspective d’une baisse des IDE dans le secteur pétrolier et gazier, les producteurs africains de pétrole ont conclu qu’il était important d’élever les niveaux d’intégration locale dans les secteurs des hydrocarbures. Et pour faire face aux réticences croissantes à financer des projets pétroliers et gaziers, les producteurs africains de brut envisagent de créer une banque à l'échelle du continent pour financer de nouveaux projets lorsque les banques internationales refusent de les financer.
Ali Titouche