Éditorial

Le savant, le politique et le religieux

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Hassane OUALI Publié 22 Décembre 2021 à 22:40

Lorsqu’il avait été interrogé sur la laïcité lors de la célèbre émission “Face à la presse” en 1990, Hocine Aït Ahmed a eu une réponse qui a valeur d’un principe constitutionnel cardinal. “Toute espèce de sacralisation du pouvoir au nom de la religion ou au nom de la révolution conduit à des gestions anti-démocratiques. Le champ religieux ne doit pas recouvrir le champ politique”, avait-il soutenu. Implacable. Ce nécessaire rappel historique, en ce sixième anniversaire de la disparition de celui qui fut un des héros de la guerre avant de devenir héraut de la démocratie, donne à mesurer l’infinie régression de la pensée politique algérienne. Alors qu’elle devait libérer les individus et la société des dogmes, elle en est devenue elle-même l’otage. Quarante ans après la prophétie d’Aït Ahmed, c’est l’inverse qui s’est réalisé. Le politique se soumet presque volontairement au religieux. La cérémonie de l’intronisation du président de l’APW de Béjaïa, ouverte et clôturée par un imam, est un signe de cette abdication. 

Loin d’être anecdotique et marginal, ce fait est la confirmation d’une tendance lourde qui structure les mœurs politiques du pays. Malaxé dans un moule réactionnaire, le personnel politique - à quelques exceptions près - rivalise avec les apprentis muftis. Signe d’un appauvrissement du débat intellectuel, l’argumentaire politique disparaît au profit de quelques versets coraniques abusivement exploités. Point de transgression. Plus d’audace. Finis les hommes politiques iconoclastes. Il faut dire que cette soumission volontaire a gagné tous les espaces, y compris les champs où naturellement la raison critique qui devait constituer l’Alpha et l’Omega. Gagnée par le dogmatisme, même l’université a presque renoncé à sa fonction.  

En acceptant la supériorité du discours religieux dans les autres domaines relevant du temporel, c’est céder sur les questions essentielles qui fondent une société démocratique. À force de matraquage et de renoncement, les valeurs de l’égalité des sexes, de l’abolition de la peine de mort, de la liberté de conscience ou de la liberté tout court deviennent taboues. Et cela se vérifie dans l’abandon de la bataille des idées. Ce n’est pas parce qu’elles peuvent heurter la sensibilité d’un “cheikh” qu’il faut voiler les idées progressistes ou taire la controverse sur les questions sociétales. La dictature sociale est aussi dangereuse que la dictature politique. La bataille de la démocratie se mène et se gagne aussi et surtout sur le terrain social et sociétal. ■  

 

  • Editorial Un air de "LIBERTÉ" s’en va

    Aujourd’hui, vous avez entre les mains le numéro 9050 de votre quotidien Liberté. C’est, malheureusement, le dernier. Après trente ans, Liberté disparaît du paysage médiatique algérien. Des milliers de foyers en seront privés, ainsi que les institutions dont les responsables avouent commencer la lecture par notre titre pour une simple raison ; c’est qu’il est différent des autres.

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    Abrous OUTOUDERT Publié 14 Avril 2022 à 12:00