Magazine Conditions de détention terribles, d’anciens détenus réclamant sa fermeture

Rikers Island, l’effrayante prison de New York

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AFP Publié 19 Septembre 2021 à 19:38

Rikers Island à New York, États-Unis, une prison qui abrite de nombreux criminels très dangereux. © D. R.
Rikers Island à New York, États-Unis, une prison qui abrite de nombreux criminels très dangereux. © D. R.

“Cancer”, “trou à rats”, “maison de l'horreur”: d'anciens détenus de la sinistre prison new-yorkaise de Rikers Island en tremblent encore quand ils évoquent ce gigantesque complexe carcéral où ont séjourné l'Américain Harvey Weinstein et le Français Dominique Strauss-Kahn, et où neuf prisonniers sont morts cette année. 

Les conditions de détention à Rikers Island, cachée sur l'East River entre le Bronx et le Queens, sont réputées effrayantes depuis des décennies. Mais aujourd'hui, les autorités locales s'alarment d'une “crise humanitaire” aggravée par l'épidémie de coronavirus, qui a meurtri New York, ses services publics et en particulier ses établissements pénitentiaires. Alors que cette semaine la ville et de l'État de New York – qui ont autorité sur Rikers Island – se sont emparés du dossier, trois anciens détenus ont confié à l'AFP leurs terribles souvenirs. 
 
“Far West” 
“C'est vraiment le Far West là-bas”, raconte Johnny Perez qui y a été incarcéré plusieurs fois entre 1996 et 2001 pour des vols à main armée. 
Glenn Martin n'a que 16 ans à la fin des années 1980 quand il y passe trois jours pour un vol à l'étalage. Il y est tabassé à quatre reprises et en parle plus de 30 ans après comme d'un “trou à rats”. 

Rikers Island ce sont aussi “des ordures partout, de la nourriture infestée d'asticots, des cafards, des vers dans les douches, des excréments et de la pisse”, s'est insurgée sur Twitter Emily Gallagher, parlementaire de l'État de New York après une visite cette semaine. L'élue a dénoncé “une crise humanitaire, une maison de l'horreur, des agressions et des mauvais traitements”.

“Torture” 
De fait, rappelle Glenn Martin, les actes de violence et de “torture” y sont légion. Pour un autre ancien détenu, Marvin Mayfield, “chacun y perd un peu de son âme”. Il y a passé 22 mois au total entre les années 1980 et 2007 pour des cambriolages.  La prison ouvre en 1932 et se taille une réputation de berceau de la violence. Dans les années 1990, Rikers Island comptait jusqu'à 20 000 détenus, soit un peu moins du tiers de la population carcérale totale en France. Ils sont 6000 aujourd'hui. 

La plupart sont des Noirs et des Hispaniques en attente d'être jugés. 
Des célébrités y sont aussi parfois enfermées avant leurs éventuels procès. L'ancien directeur général du Fonds monétaire international Dominique Strauss-Kahn a été incarcéré de manière spectaculaire en mai 2011 pour des accusations de viol d'une femme de chambre du Sofitel de Manhattan, Nafissatou Diallo. 

L'affaire  s'est  soldée  par  une  transaction  financière.  L'ex-tout-puissant producteur de cinéma Harvey Weinstein a  séjourné  également  sur l'île de l'East River. Il purge depuis 2020 à New York une peine de 23 ans de prison pour viol et comparaît à Los Angeles pour d'autres accusations de viols. Le bassiste britannique des Sex Pistols Sid Vicious et le rappeur américain Tupac Shakur, tous les deux décédés depuis, ont également franchi les grilles de Rikers Island. 
 
Suicides 
Mais pour d'anciens détenus et des spécialistes du système pénitentiaire américain, les “people” de Rikers Island n'ont rien vu de la réalité de la prison d'aujourd'hui: l'insécurité et la situation sanitaire sont “dix fois pires” que dans les années 1980-1990 et hors de contrôle depuis quelques mois. 

Les services pénitentiaires de New York ont reconnu que neuf personnes y avaient perdu la vie cette année - dix selon les médias locaux - contre sept en 2020 et trois en 2019. La moitié des décès depuis janvier sont des suicides, selon les autorités. Comme les autres services publics de la ville, la prison de Rikers Island a été durement frappée par l'épidémie de Covid-19.

D'après des syndicats, 2700 gardiens de prison – un tiers de l'ensemble du personnel pénitentiaire de New York – sont en congé maladie. Soit en raison du coronavirus, soit pour des violences de détenus.

Le maire sortant de New York Bill de Blasio a brandi cette semaine un plan d'urgence de rénovation et reparlé d'une fermeture en 2026. Avec son remplacement par quatre prisons plus petites pour 8,7 milliards de dollars. Mais rien ne dit que le prochain maire, élu à la fin de l'année, s'y conformera.

De son côté, la gouverneure de l'État de New York Kathy Hochul a annoncé vendredi la libération anticipée de 191 détenus. Pour les anciens de Rikers Island, qui travaillent aujourd'hui dans des associations, la prison doit fermer. “C'est un cancer (...) qui doit être éradiqué”, plaide M. Mayfield. 
 

AFP

 

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