Le contexte actuel de prix élevés du pétrole renforce la situation financière de l’Algérie, lui offrant une marge de manœuvre assez large pour ses dépenses futures.
Le conflit armé entre la Russie et l’Ukraine aura forcément des conséquences sur l’économie algérienne. Les importations seront les plus touchées. Comment ? La guerre a affolé les marchés des matières premières. Cela signifie que les prix à l’importation du blé, du soja et du tournesol, entre autres, seront élevés. Ainsi, le pays risque de voir s’envoler la facture de ses importations en ces produits en provenance de ces deux pays et dont il ne peut se passer. Le cours du blé a atteint jeudi 24 février, à la mi-journée, 344 euros la tonne, un prix inédit, avant de clôturer à 316,50 euros sur le marché européen Euronext. La Russie tient le haut du pavé en matière d’exportation de blé. L’Ukraine occupe, elle, la quatrième position.
Les approvisionnements en blé russe du marché algérien ont considérablement augmenté à la fin 2021 : environ 360 000 t de blé ont été exportées vers l’Algérie, pour plus de 100 millions de dollars. Il y a quelques années, les livraisons russes variaient entre 10 000 et 15 000 t par an. Cette hausse découle de l’assouplissement des conditions d’importation de blé, introduit, fin 2020, par l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC). Celui-ci a, en effet, élaboré des appels d’offres moins exigeants en ce qui concerne la limite du taux de grains punaisés pour le blé à haute teneur en protéines. En révisant ainsi les règles d’éligibilité pour l’importation, définies dans les cahiers des charges, l’Office a ouvert la voie à beaucoup plus de soumissionnaires intéressés par le marché algérien du blé, notamment aux producteurs de la mer Noire (russes et ukrainiens).
En plus du blé et des graines oléagineuses, l’Algérie importe de Russie d’autres produits : les équipements industriels et militaires. L’Algérie est et demeure un partenaire commercial important de la Fédération de Russie. Elle en est le deuxième partenaire commercial en Afrique après l’Égypte. La valeur des échanges bilatéraux a atteint, en 2020-21, environ 3 milliards de dollars. Les exportations russes vers l’Algérie pèsent pour 95% dans le volume des échanges, les importations en provenance d’Algérie étant négligeables. Quant aux échanges commerciaux avec l’Ukraine, ils restent modestes. Outre la flambée des prix, l’acheminement des marchandises depuis les ports ukrainiens et russes risque également de poser problème. Selon des informations concordantes, les flux logistiques à travers la mer Noire sont arrêtés. Il n’y a plus d’exportation possible depuis la Russie et l’Ukraine. Il y a donc une rupture des flux, mais aussi un défaut de livraison de ce qui a été contractualisé.
Cependant, le malheur des uns faisant souvent le bonheur des autres, la guerre en Ukraine a notamment fait flamber les cours du pétrole, ce qui devrait générer des revenus inespérés pour les pays pétroliers. Ainsi, le contexte actuel de prix élevés (le baril de brent a dépassé la barre des 100 dollars) renforce la situation financière de l’Algérie, lui offrant une marge de manœuvre assez large pour ses dépenses futures. De même, il lui permet de reconstituer ses réserves de changes. Cela, sous réserve que la tendance à la hausse des cours de l’or noir dure dans le temps.
Youcef Salami