Les services financiers numériques peuvent être les vecteurs de la reprise économique en Algérie. C’est du moins ce que pensent Dorothee Delort, spécialiste senior du secteur financier au sein du groupe Banque mondiale, et Isabelle Poupaert, membre de l'équipe des relations extérieures de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (Mena).
Les deux spécialistes estiment, dans un blog, que la transformation numérique, qui figurait avant la crise parmi les principaux objectifs de développement pour l'Algérie, est désormais l'un des facteurs clés de la reprise économique.
Selon elles, “l'accès à des services financiers abordables joue un rôle essentiel dans la réduction de la pauvreté, la croissance économique et la résilience aux crises. C’est aussi un jalon primordial pour ouvrir la voie à l'inclusion financière, en particulier pour les femmes”.
Or, relèvent les deux expertes, “en Algérie aujourd'hui, 57% des adultes en général et 71% des femmes ne disposent toujours pas d'un simple compte courant qui leur permettrait au moins d’effectuer et recevoir des paiements de manière sécurisée et efficace”. De ce fait, ajoutent-elles, “ces populations sont également privées d'accès à d'autres services financiers tels que l'épargne, l'assurance ou le crédit”.
Les services financiers numériques ou dématérialisés, rendus possibles par la Fintech ou développés par des prestataires plus traditionnels, offrent la possibilité de réduire les coûts, améliorer la rapidité, la sécurité et la transparence des transactions, et faciliter l’accès à des services plus sûrs.
Pour les Algériens peu accoutumés au secteur financier, un meilleur accès aux paiements numériques offrirait une passerelle vers ces services. La forte pénétration de la téléphonie mobile dans de nombreux pays en développement a permis l’éclosion de la première génération de services financiers dématérialisés, avec l’essor des systèmes de paiement par mobile.
“Cependant, si l'Algérie bénéficie d'une couverture mobile haut débit supérieure à la moyenne de la région Mena, l'utilisation de ces services y reste très faible : dans le pays, seulement 16% des adultes en général et 11% des femmes ont recours à des paiements numériques, contre 23% des adultes et 18% des femmes dans l'ensemble de la région Mena, ces chiffres étant respectivement de 36% et 32% dans les économies émergentes et en développement”, relève-t-on.
En quoi les services financiers dématérialisés peuvent-ils aider l'Algérie à faire face à la Covid-19 ? Pour Dorothee Delort et Isabelle Poupaert, les services financiers dématérialisés offrent aux pouvoirs publics un moyen sûr et rapide d'atteindre les personnes vulnérables par les transferts sociaux et autres aides financières.
Citant les données Findex, elles indiquent que des millions d'Algériens, bien que disposant d'un compte courant, continuent à utiliser des services au guichet pour envoyer ou recevoir des fonds à l'intérieur du pays.
Si l'Algérie a accompli des progrès, en encourageant les innovations apportées par la Fintech et en développant les services financiers numériques, “il reste encore à faire pour stimuler leur développement et faire connaître leurs avantages”, font remarquer les deux responsables de la Banque mondiale.
Pour rappel, l’indice du commerce électronique B2C (Business-to-Consumer) de la Cnuced 2020, publié le 17 février dernier, classe l’Algérien à la 80e place sur 152 pays. L'Algérie a progressé de 29 places par rapport au classement de 2019. Selon la Cnuced, l’Algérie figure parmi les quatre pays ayant réalisé les plus fortes hausses des scores de l'indice.
Meziane RABHI