L’Europe pourrait-elle se passer du pétrole et du gaz russes ? La question fait l’objet d’un débat public et il est clair que certains pays européens envisagent de passer à l’acte, c’est-à-dire d’imposer un embargo contre le gaz et le pétrole russes, tout en sachant qu’il y a beaucoup plus à perdre qu’à gagner dans cette mesure.
L’Europe ne perd toutefois pas espoir, estimant qu’il peut y avoir une solution au conflit entre Russes et Ukrainiens. L’Ukraine est le pays de transit le plus important pour l’acheminement du gaz russe vers l’Europe occidentale, étant donné que 80 à 90% des exportations de gaz russe traversent le territoire ukrainien.
La Slovaquie est également pour le gaz russe un pays de transit stratégique, en ce qui concerne aussi bien l’Union européenne que la région. Les capacités de transit et de stockage étant en cours de développement. Cela montre bien la complexité et les connexions européennes en matière d’approvisionnement en gaz russe. Mais l’Europe veut réagir à une situation qui risque de perdurer et de créer du désordre sur le marché de l’énergie.
Elle doit sécuriser les prix et l’approvisionnement de l’énergie. Commet peut-elle le faire ? Cette question va occuper une partie des discussions lors du sommet, prévu aujourd’hui (jeudi 24 mars) entre les chefs d’État et de gouvernement de l’UE.
Le problème est que les Vingt-Sept n’ont pas la même approche sur la façon de protéger les consommateurs et l’activité économique. Certains pays adhèrent à l’idée que les coûts de l’énergie doivent être plafonnés.
L’initiative semble avoir convaincu plusieurs États membres du Sud, tels que l’Italie, la Grèce et le Portugal, mais aussi la France, la Belgique et des pays d’Europe centrale. Mais certains États membres, comme l’Allemagne et les Pays-Bas, ne veulent pas d’intervention sur le marché de l’énergie.
Ainsi, le consensus est loin d’être atteint, chaque pays ayant ses propres problèmes en matière d’énergie. Côté français, par exemple, Total va renoncer au pétrole russe d’ici à la fin de l’année. Cependant, cette approche n’est pas sans problèmes non plus.
“Si nous arrêtons le gaz russe, nous savons que nous aurons un problème en janvier 2023, il faudra rationner l’utilisation du gaz”, a indiqué Patrick Pouyanné, le patron de Total. Pour lui, ce rationnement ne concernera pas les particuliers, mais plutôt les industriels européens.
La crise du gaz remet, par ailleurs, l’énergie nucléaire au cœur du débat. Alors que la Belgique a annoncé la prolongation de la durée de vie de ses deux centrales nucléaires, le Royaume-Uni veut aussi relancer l’atome.
Le Premier ministre, Boris Johnson, a ainsi rencontré les industriels du secteur, lundi dernier, avec l’ambition affichée de porter à 25% la part du nucléaire dans son mix énergétique, selon The Guardian. Actuellement, l’atome représente 16% de la production électrique du Royaume-Uni, mais plusieurs centrales vieillissantes doivent fermer leurs portes.
Le pétrole et le gaz font la prospérité économique de la Russie. Avec la guerre en Ukraine, ils sont devenus une source de préoccupation pour les pays européens.
Dans son rapport mensuel publié la semaine dernière, l’AIE estime que si le marché physique du pétrole a été peu affecté jusqu’à présent, grâce aux contrats à terme et aux accords commerciaux conclus avant l’invasion de l’Ukraine, les sanctions économiques sans précédent imposées à la Russie et la décision de nombreuses compagnies pétrolières, sociétés de négoce, compagnies maritimes et banques de cesser de faire des affaires avec la Russie pourraient créer un “choc d’approvisionnement mondial en pétrole de 3 mb/j d’ici à avril”.
Youcef SALAMI