La troisième guerre mondiale, dont certains aiment à prédire l’éclatement imminent en raison de la crise ukrainienne, ne devra sans doute pas avoir lieu… ! Du moins pas dans le contexte actuel où les forces des uns et des autres s’équilibrent militairement et où les véritables “belligérants” — Russie et États-Unis, notamment — disposent chacun de codes nucléaires que ni l’homme fort de Moscou ni l’establishment américain ne voudraient réellement actionner. Sauf à mettre en danger la survie même de la civilisation humaine tout entière. Dès lors, la véritable guerre qui se joue actuellement sous nos yeux est bien plus effective et plus décisive que ce que laissent entrevoir les surenchères diplomatiques et politiques auxquelles se livrent actuellement les principaux leaders du monde par médias interposés.
De fait, si les bruits de bottes, à proprement parler, restent plutôt hésitants et circonscrits aux frontières de la seule Ukraine, la guerre économique et énergétique, elle, fait déjà véritablement rage, au vu des tensions inédites que connaissent actuellement les bourses mondiales de matières premières, dont surtout les marchés du pétrole et du gaz. En l’espace d’à peine quelques jours, la crise ukrainienne fait retrouver aux prix de l’or noir des sommets jamais vus depuis le contre-choc pétrolier de 2014, le baril caracolant désormais à près de 100 dollars, soit un niveau de prix que l’on pensait impossible, il y a peine quelques mois.
Dans ce sillage, le gaz, dont les prix sont indexés à ceux du pétrole, devient la carte-maîtresse autour de laquelle se trament aujourd’hui les dessous de la guerre larvée que se livrent les principales puissances mondiales. L’Europe craint au plus haut degré de voir interrompue, du moins perturbée, la sécurité de ses approvisionnements en gaz naturel. Les États-Unis, pourtant premier producteur mondial de brut, redoutent, eux, de voir trop se rétrécir l’offre énergétique mondiale au point de casser la fragile reprise économique qui commence à poindre, après plus de deux ans de récession.
Realpolitik oblige, la Russie, pour sa part, brandit pragmatiquement son statut de grand fournisseur de pétrole et de gaz pour faire valoir ses ambitions géopolitiques et sécuritaires face à l’Otan et aux États-Unis. Pays des plus importants sur l’échiquier gazier mondial, fournisseur des plus fiables de l’Europe, l’Algérie, elle, peut tirer pragmatiquement son épingle de ce jeu géopolitique qui se trame autour des tensions en Ukraine et de la stabilité énergétique du monde occidental. ■