Il est de ces noms qui marquent indélébilement de leur passage le domaine dans lequel ils évoluent même si, parfois, pour ne pas dire souvent, on oublie de les évoquer ou pire, on les dénigre. Mais leur travail et leur empreinte sont toujours là et témoignent de leur talent et de leur professionnalisme précoce. Parmi ces noms, il y a l’un des premiers réalisateurs de la télévision algérienne, à savoir, Abdelghani Mehdaoui, duquel Liberté s’est rapproché pour revenir sur son riche parcours.
Liberté : Votre parcours fut riche ; radio, théâtre, télévision… Pouvez-vous revenir sur votre carrière pour nos lecteurs ?
Abdelghani Mehdaoui : Mes débuts dans le monde artistique remontent au mois de février de l’année 1955, alors que je n’avais que 13 ans. Ma première participation était dans une émission enfantine avec cheikh Lakhdar Essaihi. Par la suite, j’ai participé à d’autres émissions enfantines avec Réda Falaki ; parallèlement, je collaborais dans des pièces radiophoniques où j’interprétais des rôles de gamin avec Mohamed Touri.
En 1956, Mahieddine Bachtarzi a ouvert la première classe d’art dramatique en langue arabe au conservatoire d’Alger.
Je m’y suis inscrit. Mon premier professeur était Djelloul Bachdjarah. Ensuite, et pour une courte période, est arrivé Mohamed Touri.
Mustapha Kazdarli lui a succédé durant deux années. À la fin de l’année 1958, alors que je n’avais que 16 ans, j’ai écrit une pièce radiophonique qui a pour titre “J’ai tué mon fils”.
Elle fut réalisée pour la radio par Mohamed Touri. Le rôle principal fut confié à Mme Keltoum.
J’ai par la suite écrit une opérette Les malheurs de la vie, qui fut réalisée par Sissani, et a vu la participation de Abderrahmane Aziz, El-Hachemi Guerouabi, Latifa et bien d’autres noms.
Quand avez-vous rejoint la télévision ?
En ce qui concerne la télévision, en 1959, j’ai débuté comme script avec le réalisateur Mustapha Gribi. Je suis ensuite passé au poste d’assistant réalisateur, durant une année.
En 1963, je fus promu réalisateur. Ma première réalisation fut un concert de musique en direct avec la chanteuse Djida.
En décembre 1963, j’ai réalisé le premier court-métrage de fiction de la télévision algérienne en support cinéma 16mm qui s’intitule “Meurtre pour héritage”. Je précise qu’il s’agit du premier film historique de la télévision algérienne.
Et le cinéma ?
Durant tout le parcours de ma carrière, je fus un homme de télévision et non pas de cinéma.
Vous avez été écarté trop tôt, pourquoi ?
Mon éloignement du domaine de la télévision est dû à la dissolution de l’ENPA (Entreprise nationale de production audiovisuelle) en 1997. Je n’ai jamais été écarté. Quant à cette dissolution, elle a été décidée “d’en haut”, et je n’en connais pas les raisons…
En ce moment, il y a une polémique autour du Fdatic, qu’en pensez-vous ?
En ce qui concerne le Fdatic, il existait déjà durant les années 1990 présidé par Ahmed Bedjaoui. Aujourd’hui, je ne vis plus en Algérie… Mais j’ai un œil en permanence sur mon pays et je suis de très près les réalisations de la télévision algérienne.
Les jeunes réalisateurs font ce qu’ils peuvent au vu de la conjoncture que je connais de l’Algérie. Ce n’est pas nouveau. Il n’y a jamais eu une véritable volonté politique de donner un essor au domaine culturel…
Citez-nous quelques unes de vos réalisations et quelques artistes qui ont marqué votre parcours ?
J’en ai eu beaucoup, et ce n’est pas simple de les énumérer tous, mais je citerais par exemple Les chats, le dernier film de l’inspecteur Tahar, ou encore Incarnada tourné en 1973 avec Abdelkader Tadjer et Farida Sabounji, et aussi Médecin de village sorti en 1975 avec la participation de Athmane Ariouet. Pour ce qui est des artistes, il y a Rouiched, et Mohamed Ouaniche pour son sérieux et son savoir-faire ; parmi les plus jeunes, je citerais Djaffar Gacem.
Vous avez quitté l’Algérie et votre domaine de prédilection aussi…
Je suis parti en France en 1996. Mon intérêt porte-et a toujours porté d’ailleurs- sur la culture maghrébine, notamment la poésie populaire. Ce qui m’a amené aujourd’hui à écrire un lexique arabo-français des mots usités dans cette poésie. Un ouvrage de 700 pages.
Un mot pour les jeunes réalisateurs algériens ?
Mon conseil aux jeunes réalisateurs est qu’ils persistent dans leur travail avec assiduité.
Propos recueillis par : Samira Bendris-Oulebsir