L’islamologue et chercheur en soufisme, Saïd Djabelkhir, fondateur du « Cercle des Lumières pour la pensée libre », comparaitra le 25 février prochain devant la chambre correctionnelle du tribunal de Sidi M’hamed, à Alger, pour « atteinte à la religion », aux préceptes de l’islam et à des versets coraniques» notamment.
Contacté, ce lundi, par Liberté Web, Saïd Djabelkhir affirme n’avoir été « ni auditionné ni convoqué par la justice », et qu’il a appris la nouvelle de son procès par le biais de ses détracteurs qui ont largement relayé l’information sur les réseaux sociaux.
C’est, en effet, un spécialiste en sécurité numérique et enseignant à l’université Djillali-Liabès de Sidi Bel Abbès, du nom de Bachir Bouyedjra Aberrezak, qui a annoncé la nouvelle, dimanche, sur sa page facebook, où il a publié une photo au tribunal de Sidi M’hamed, en compagnie de plusieurs avocats qui se sont également constitués comme « plaignants ».
L’enseignant en question ne s’est pas d’ailleurs limité à annoncer la date de la tenue du procès, puisqu’il incite, dans le même post facebook, les Algériens à mener une large compagne contre Saïd Djabelkhir.
« Je saisie cette occasion pour lancer un appel à tous les sympathisants à diffuser l’affaire, la soutenir et compatir, car la situation nécessite un large appui du public et des médias à travers tous les canaux d’information », a-t-il lancé.
L’islamologue et chercheur en soufisme qui se dit d’abord perplexe s’agissant du « non-respect de la procédure légale », comme il n’a pas été auditionné pendant l’instruction de l’affaire, considère « très grave » la compagne de lynchage que lance contre lui ses détracteurs.
« Lorsqu’on porte une affaire devant un tribunal, on laisse, en principe, la justice faire son travail. Mais de là à lancer des appels, c’est quelque chose de très grave », dénonce-t-il.
Saïd Djabelkhir ne comprend pas également comment il peut être poursuivi en justice pour des questions qui relèvent « strictement du débat académique ».
«Je crois que c’est pour la première fois qu’on poursuit un chercheur pour ses idées et son travail académique. S’il y a un spécialiste dans le domaine qui voit les choses différemment, je souhaite qu’il m’apporte la contradiction de façon académique. Toutes les questions sont discutables et il n’y a pas de vérité absolue. Porter plainte contre quelqu’un qui n’est pas de son avis est quelque chose de jamais vu», soutient-t-il.
Me Zoubida Assoul qui s’est portée volontaire, ce lundi, pour la défense de l’islamologue, a affirmé à Liberté Web que son mandat est poursuivi sur la base de l’article 144 bis 2, relatif à l’«offense à l’islam ».
Fait intriguant, relève Me Assoul, les avocats qui ont accompagné l’enseignant de l’université de Sidi Bel Abbes « se sont constitués plaignants et avocats à la fois ».
«Ces avocats sont mandatés et n’ont pas donc la qualité de porter plainte devant le juge d’instruction. Ils ne sont pas les avocats de Dieu et de l’Islam. Dans le cadre d’offense à l’islam, seul le parquet est habilité à s’autosaisir et enclencher des poursuites judiciaires »explique-t-elle.
S’agissant de la « campagne de lynchage » lancée contre son client par l’enseignant universitaire Bachir Bouyedjra Aberrezak, Me Zoubida Assoul évoque une forme d’ «inquisition » et d’ «incitation à la violence ».
« Dans un Etat de droit, la justice procéderait immédiatement à la convocation de cette personne », conclut-elle.
Mehdi Mehenni