Transmettre des connaissances, forger la personnalité et préparer les enfants à la vie d’adulte, mais aussi et surtout à la citoyenneté. L’école algérienne peine à assumer cette vocation historique. Sa manière d’instruire, de former et d’éduquer est loin de répondre aux exigences de la modernité scientifique. Conséquence des choix politiques peu ambitieux, l’institution éducative n’a pas cessé d’enchaîner des contre-performances. La qualité de l’enseignement a évolué en s’appauvrissant outrageusement. Le taux d’échec scolaire est considérable, non pas parce que nos élèves sont moins doués, mais en raison d’un système éducatif qui a failli dans sa mission.
Enfermée dans un populisme éhonté, notre école est soumise au chantage d’une idéologie de régression sans fin. Il ne lui reste de rationalité que le portrait de Mustapha Lacheraf qui orne les couloirs du ministère de l’Éducation nationale comme pour rappeler une brillante, mais lointaine époque. Livrée aux forces réactionnaires en faisant d’elle un centre de reproduction de la pensée dominante, l’institution est devenue, au terme d’un long processus d’infantilisation, otage du courant islamo-conservateur.
En faisant main-basse sur l’école, il se dresse en permanence contre toute tentative d’émancipation. L’épisode Benghabrit est, à ce titre, révélateur du poids écrasant de cette famille idéologique qui, sans cesse, fait du chantage à la société. Malgré la déroute pédagogique et morale qu’ils ont infligée à des générations d’enfants, les tenants d’une école sclérosée et ascientifique continuent de dicter la leçon à enseigner aux apprenants.
Au nom des constantes, perfidement arborées, ils élargissent tristement leur champ de domination. Et dans une hypocrisie criminelle, l’establishment a toujours appuyé ce mouvement rétrograde, alors que ses membres s’arrangent pour envoyer leur progéniture étudier ailleurs, dans les prestigieuses écoles laïques et modernes. Certains se bousculent, le matin, pour les inscrire au lycée français avant de venir le soir sur les plateaux de télé louer les mérites de l’école fondamentale. Il n’est plus possible aujourd’hui de laisser faire le massacre scolaire. Le sauvetage de l’école n’incombe pas seulement au ministre de l’Éducation, c’est un enjeu de société qu’il faudra relever. La bataille des idées se mène et se gagne autour de cette question centrale longtemps abandonnée aux forces de la réaction. ■