Éditorial

Requiem

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Karim KEBIR Publié 11 Avril 2022 à 12:00

Qui aurait bien pu l’imaginer ? En tout cas pas l’auteur de ces lignes qui, près de deux décennies durant, aura vécu les péripéties de l’entreprise, autant dans ses moments fastes que dans ses instants d’égarement et d’incertitude : à quelques semaines de la célébration de ses trente années d’existence, le journal que vous avez entre les mains va disparaître du paysage médiatique national. Dans trois jours, c’est le baisser de rideau. Le clap de fin. Encore quatre numéros, et le titre rejoindra dans le rayon des souvenirs ceux qui ont connu un triste sort similaire, à l’image du Matin ou encore d’Alger Républicain. Au regard de la vague d’émotion et d’indignation que cette disparition a suscité auprès de l’opinion, on mesure aujourd’hui toute la place qu’a pu occuper Liberté, mais surtout de ce qu’il représentait auprès de ses lecteurs. Et aussi de ses contempteurs. Pensé par ses fondateurs comme instrument pour porter le projet soummamien, comme porte-voix de la dynamique des forces de progrès et pour participer à la promotion de la perspective démocratique et moderne du pays, Liberté a fini, compte tenu de l’évolution de l’environnement politique, particulièrement ces dernières années, par se heurter à la dure réalité d’un pays réfractaire au renouvellement et à une approche rénovée de son avenir. Un pays frappé de stérilité politique et incapable de se projeter en dehors d’une pensée uniciste et d’un unanimisme mortifère hypothéquant l’avenir de générations entières. Un pays qui ne s’accommode pas de la pensée critique et dont l’horloge semble être réglée de nouveau sur l’époque du noir et blanc. En dehors de ceux qui s’y reconnaissent, il y a comme une proscription unanime pour la disparition d’un titre emblématique et mémoire de l’Algérie contemporaine. Sinon, comment expliquer ce mutisme assourdissant des autorités et de nombreux confrères ? Un silence qui tranche singulièrement avec l’indignation de l’élite progressiste et des confrères d’outre-mer qui, sans doute, prennent toute la mesure de ce qu’il en coûte pour le projet démocratique et pour des sociétés comme la nôtre de voir disparaître une voix, porte-voix des sans-voix. Au-delà de laisser orphelin un courant d’opinion, impuissant face au rouleau compresseur de la normalisation, la disparition de Liberté questionne l’existence d’une réelle presse professionnelle à l’ombre d’un régime obsolète, du modèle économique des entreprises médiatiques et du futur d’un métier dont le crédit est fortement écorné. ■

  • Editorial Un air de "LIBERTÉ" s’en va

    Aujourd’hui, vous avez entre les mains le numéro 9050 de votre quotidien Liberté. C’est, malheureusement, le dernier. Après trente ans, Liberté disparaît du paysage médiatique algérien. Des milliers de foyers en seront privés, ainsi que les institutions dont les responsables avouent commencer la lecture par notre titre pour une simple raison ; c’est qu’il est différent des autres.

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    Abrous OUTOUDERT Publié 14 Avril 2022 à 12:00